La Déesse Isthar/Inanna
Inanna dans la mythologie sumérienne ou Isthar chez les babyloniens, est la divinité de la vie, de la fertilité et de l’amour. Mais elle est aussi également déesse de la guerre et de la discorde.
Elle fut pendant plus de trois millénaires une importante figure divine. En effet initialement célébré dans la ville d’Uruk, son culte se répandit à travers toute la région. Elle est associée à la planète Vénus c’est-à-dire sa représentation avec une étoile à 8 branches. Par la suite , elle sera assimilée par les phéniciens à leur déesse Astarté. Aphrodite chez les grecs, Vénus chez les romains, Lilith chez les hébreux, etc.
Généalogie
Dans la mythologie sumérienne et selon les traditions, Isthar est la fille du Dieu Lune Nanna/Sin et de Ningal. Elle a pour frère le Dieu du Soleil Utu/Shamash et pour sœur la déesse des enfers Ereshkigal. De ce fait, elle est la petite fille du grand dieu Enlil.
Mais dans d’autres traditions, elle est la fille d’Enlil ou la fille du dieu céleste An/Anu. Quelque soit sa filiation, elle fait partie du panthéon des grandes divinités sumériennes.
Vous pouvez lire également les dieux sumériens pour mieux connaitre la cosmogonie sumérienne.
Cultes et symbolisme
Toutes les croyances du Proche-Orient avaient une multitude de déesses qui dérivaient les unes des autres. Mais ces déesses étaient la représentation de la déesse Isthar sous différents noms et attributs.
En effet, Isthar avait de nombreux symboles et attributs comme la conque, l’étoile à 8 branches, le croissant et la pleine lune, le lion, le cerf, la vache qui allaite, etc. Et elle avait de nombreuses appellations comme Belet-ili, Nintinugga, ; Banîtu comme la Créatrice ; Nikkal comme la pleine Lune, et Nanaya comme la magnifique Fille voilée de An.
Le premier lieu de culte d’Inanna/Isthar est la ville d’Uruk au sud de la Mésopotamie. Son culte est attesté dès la fin du IIIe millénaire. La cité d’Uruk, l’une des première ville urbaine renforce la puissance du temple de cette déesse. De ce fait son culte se propagea assez rapidement en basse Mésopotamie à Kish, Babylone, Akkad et Nippur. Et à Ninive, Assur et Arbelès en haute Mésopotamie.
Selon la localité, Isthar peut subir des variantes qui peuvent être différentes et uniques. Par exemple l’Isthar d’Arbelès est une guerrière et très peu liée à l’amour et à la sexualité. Tandis que les caractéristiques de l’Isthar de Babylone ou Innana d’Uruk sont l’amour et la fertilité.
Entre Amour et Haine
Les différentes sources mésopotamiennes, nous présente une image de la déesse Isthar contradictoire. En effet, elle était considérée comme la Mère de toute l’humanité, l’épouse voilée dont les caractéristiques sont la beauté, la pureté et chasteté. Et, en même temps elle pouvait être représentée comme une démone, une prostitué et avide de sexe.
Contradiction
Dans la religion assyrienne, le rôle d’Ishtar était la Mère divine du roi qui lui dispense sainteté, sagesse et perfection et le protège farouchement contre ses ennemis. Cela pourrait expliquer beaucoup de son imagerie contradictoire et de son iconographie.
Sage fille de Sin, bien-aimée sœur de Shamash, je suis la Puissante à Borsippa ; je suis l’Hiérodule à Uruk, j’ai une lourde poitrine à Daduni, j’ai une barbe à Babylone, mais je suis (en fait) Nanaya.
Hymne de louange de la déesse Isthar
En effet, elle est aussi représentée sous les traits d’une reine barbue du ciel, ou comme un buffle agressif, une lionne féroce, ou une vache léchant et allaitant son veau. Ces diverses images illustrent la relation « mère/enfant » qui existe entre la Déesse et le roi. Et son rôle d’idole, qui protégeait des ennemies et apportait la victoire aux armées.
Par ailleurs, dans le mythe de l’épopée de Gilgamesh, elle a le rôle d’une colérique et vengeresse. Car elle voulut faire de Gilgamesh son amant mais celui-ci refusa assez ouvertement. Furieuse, elle demanda à son père Anu d’envoyer le taureau céleste pour tuer Gilgamesh et son ami Enkidu. Mais ils réussirent à tuer le taureau céleste et jetèrent la dépouille à ses pieds. Alors elle se vengea en faisant mourir Enkidu.
La nature controversée ainsi que sa pluralité étaient bien assimilées dans la Mésopotamie Antique. Et ce paradoxe était intentionnels, afin qu’elle puisse englober tous les aspects du monde humain. En effet son culte pouvait même englober tous les dieux mâles et leurs attributs. Son symbole à 8 branches représentait la planète Vénus mais aussi Isthar comme la Porteuse de tous les pouvoirs.
Son culte aurait ’il un lien avec l’étoile de Bethléem qui guida les rois mages, et qui est généralement représentée comme une étoile à huit branches dans l’art sacré. Par la suite, l’étoile de Bethléem devient le symbole de la nativité du Christ et de la rédemption qu’il apporte aux hommes.
Le combat du patriarcat
L’Ancien Testament est le premier livre sacré à ne faire intervenir aucune divinité féminine et ose ce que les patriarcats précédents n’avaient pas fait : éradiquer toute trace de culte féminin.
Lorsque la Grande Déesse était considérée comme immortelle, immuable, toute-puissante, le concept de filiation par le père n’était pas encore connu. Si la Déesse a longtemps régné seule dans les mythes de Sumer, au premier temps patriarcal apparaissent des dieux Pères, alors que la déesse devient fille-épouse, avant d’être bibliquement éliminée. Yahvé est le premier Dieu sans concurrence féminine qui vient clore la mise en place progressive des patriarcats dans cette région du monde avant-gardiste pour avoir vu débuter le néolithique, son agriculture et l’élevage.
L’épouse de Dieu
Yahvé (El, le dieu) eut une compagne, Asherah (de l’hébreu אשרה), qui est le prénom d’Elat (la déesse). Elle était vénérée avant -600. Asherah est souvent vue comme la version cananéenne de la déesse Athirat (ou ʼAṯirat), une importante déesse-mère au culte répandu au Moyen-Orient.
Asherah est connu dans la Bible comme la « Reine du Ciel » (Jérémie 7.18, 44.17) et est appelée « Artémis« par les Ephésiens dans le livre des Actes (chapitre 19). Le mot »Asherah » est trouvé au moins 40 fois dans l’Ancien Testament. Il fait référence à un objet en bois utilisés dans le culte de la parèdre de Baal, c’est-à-dire Asherah. Dans les lieux de culte de l’Israël antique, Ashera était traditionnellement symbolisée par un poteau sacré, symbole de la fécondité.
Sources archéologiques
Les ostraca (tesson de poterie utilisé comme support d’écriture) de Kuntillet Ajrud (site au nord-est du Sinaï) datant du VIIIe siècle av. J.-C., dans le désert du Sinaï, portent ainsi l’inscription « Berakhti et’hem l’YHWH Shomron [ou Shomrenou] ulè Asherato » (« Je vous ai bénis par YHWH de Samarie et Son Asherah » ou « Je vous ai bénis par YHVH notre gardien et Son Asherah », selon qu’on lise Shomron : Samarie ou Shomrenou : notre gardien). On trouve aussi la mention « YHWH et son Ashera » sur une inscription datant de la monarchie tardive (vers 600 av. J.-C.) dans la région de la Shefelah (royaume de Juda) .
Le combat des premiers monothéistes
Les autels, les piliers et les idoles, condamnés par Yahvé, étaient placés dans les bosquets d’arbres. Le nom de la déesse Cananéenne Asteroth signifie “arbre sacré” mais cette traduction est redondante dans la mesure où tous les arbres étaient sacrés pour les peuples antiques de l’Europe et du Proche Orient. Les arbres étaient révérés comme divins avant que des images sculptées d’arbres fussent érigées pour être vénérées.
La représentation d’Asherah est un arbre, le palmier-dattier, utilisé dans son culte par les canaanites et les phéniciens. Leurs dattiers sont appelés asherim. Son nom phénicien vient du grec dattier. Ils habitaient les cités-états phéniciennes de Sidon et de Tyr (Liban). La phénicienne Jézabel épousa Ashab, roi samaritain d’Israël, et amena avec elle l’adoration de ces arbres. Cette pratique passe en Israël et sera combattue par le prophète Élie, et dénoncée par Jérémie. Les tribus d’Israël emmèneront cette pratique avec eux à Babylone.
La bible
Dans la Bible il est expliqué que c’est seulement lors des réformes de Josias et d’Ezéchias que fut enlevé du temple de Jérusalem l’emblème d’ASHERAH (un poteau sacré appelé « ASHERE »). Le Pentateuque en parle quatre fois comme des idoles à détruire :
« Ezéchias fit ce qui est agréable à Yahvé, imitant tout ce qu’avait fait David, son ancêtre. C’est lui qui supprima les hauts lieux, brisa les statues, coupa les Ashérah et mit en pièces le serpent d’airain … » (Rois II 18, 3-4)
« Et il fit emporter Ashérah hors de la maison de l’Éternel (Yahweh), hors de Jérusalem, dans la vallée du Cédron, et il la brûla dans la vallée du Cédron, et la réduisit en poussière, et en jeta la poussière sur les sépulcres des fils du peuple. » (Rois II 23, 6)
« Et il brisa les statues, et coupa les poteaux symbolisant Ashérah et remplit d’ossements d’hommes les lieux où ils étaient. » (Rois II 23,14)
Deutéronome, chapitre 16 : »Tu ne te planteras point d’emblème d’Ashéra, aucun arbre, auprès de l’autel que tu dresseras à l’Éternel ton Dieu. »
Et le roi Josias, vers -630, « ordonna […] de retirer du sanctuaire de Yahvé tous les objets de culte qui avaient été faits pour Baal, pour Ashera et pour toute l’armée du ciel […]. Il supprima les faux prêtres que les rois de Juda avaient installés et qui sacrifiaient […] à Baal, au soleil, à la lune, aux constellations et à toute l’armée du ciel. […] Il démolit la demeure des prostituées sacrées, qui était dans le temple de Yahvé[…] ».
La destruction des temples de la Déesse
Présente dans les récits précédents connus de cette région, Lilith première épouse d’Adam (assimilée à Isthar) disparaît de la réécriture biblique sélective. Si le culte de la déesse existe toujours en Palestine au moment où émerge Yahvé, ce sont les empereurs chrétiens de Rome et de Byzance qui firent fermer les derniers temples de la Déesse vers l’an 500 de notre ère.
« Vous détruirez tous les lieux où les nations que vous allez chasser servent leurs Dieux, sur les hautes montagnes, sur les collines et sous tout arbre vert. Vous renverserez leurs autels, vous briserez leurs statues, vous brûlerez au feu leurs idoles, vous abattrez les images taillées de leurs Dieux et vous ferez disparaître leurs noms de ces lieux-là »
Deutéronome 12, 2-3
Dans les faits, ce sont bien les cultes du féminin qui sont visés : Montagne, Arbre, Serpent honni, pierres levées et pieux sacrés, figurines représentant une femme debout soutenant ses seins avec ses mains, déesses nues de la fertilité consacrée à l’ancienne déesse Asherah épouse de YHWH.
Vers la fin du VIIIe s. av. J.C., on se mit à proclamer que seul YHWH devait être honoré, en y incluant une revendication territoriale. Et c’est au VIIe s. av. J.C., pendant le règne du roi Josias, que les dirigeants de Jérusalem ont jeté l’anathème sur la moindre trace de vénération des déités étrangères, extirpant les rituels propitiatoires pour la fertilité de la terre et la bénédiction des ancêtres avec la destruction de tous les sanctuaires locaux.
Le Temple de Jérusalem devant être reconnu comme « l’unique » lieu de culte, avec aussi la purification de l’idolâtrie initiée par Salomon avec son harem de femmes et dont le « cœur ne fut plus tout entier à Yahvé », qui suivit même Astarté, « reine du ciel », à laquelle des Juives offraient encore des gâteaux peu avant la destruction du royaume de Judée par Nabuchodonosor en 586 avant J.-C.
Sources:
-Le mouvement Matricien (à lire absolument)
-Mythologica
-Wikipédia
-L’histoire commence à Sumer de Noah Samuel Kramer
-La mythologie Babylonienne de Karine Safa
-La bible dévoilée de Israel Finkelstein et de Neil Asher Silberman
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