Parler aux morts

Faits insolites en Haïti : Parler avec les morts


Dans le cadre des mystères occultes des îles: Raphlee jeune étudiante et écrivaine haïtienne partagera une fois par mois les faits insolites et mystiques de son île afin de démystifier sa riche culture.

Parler avec les morts dirait-on est un euphémisme? Pourtant ce n’est que monnaie courante, on en parle du matin au soir sans chichi et sans peur. Divers rituels sont utilisés pour le faire, et avec le vaudou ça varie d’une personne à une autre, d’une bitation à une autre. Même les novices arrivent à avoir des réponses.

Avant il n’y avait que la table tournante comme moyen le plus accessibls pour parler avec les morts, et pour cela il fallait les services d’un gangan, et/ou par vous-même dépendamment de votre force mystique. Les services des ougans étant un peu cher (le plus souvent des charlatans qui vous escroque, pas étonnant ! puisque la plupart de nous fuient notre culture et les rares personnes qui en savent s’en cachent.)

Et aussi il y a ceux qui trop prude ou encore de fervents chrétiens qui ne veulent pas qu’on les voit sortir de chez un prête vaudou. Tant d’hypocrisie envers cette mère aimante qui ne demande qu’à être connue. Mais bon on n’en fera pas tout un plat !

Ce petit récit racontera quelques témoignages anonymes sur le contact avec les morts.

Avec le temps une simple petite bougie permettait la liaison avec des morts, et ça peut varier d’une personne à une autre. Même que de simple novice l’on fait et ont eu leur réponse. Pour reprendre une grande prêtresse vaudou :

Le vaudou est partout en nous qu’on le veuille ou non ! Du plus petit athée au plus grand chrétien. Il y a pas à sortir de là ! Notre histoire s’enracine même avec le vaudou.

Voilà ainsi donc quelques témoignages de la liaison avec les morts à travers une bougie. Malgré la facilité de la bougie, la table tournante reste et demeure, car c’est un contact plus direct avec le mort. Pour la bougie c’est simple même qu’un enfant en bas-âge peut le faire (que dis-je les enfants en bas-âges de certaines provinces le font).

Il suffit juste d’une bougie, mais avant tout on demande le passage aux entités responsables. Puis 2 – 3 godet dlo devant la porte, le nom du carrefour ou l’on habite, le nom de votre bitation, le nom de la bitation de la personne morte avec qui vous voulez parler et la demande de passage aux responsables.

Après avoir allumé votre bougie, vous pouvez enfin parler. Autant de mots, autant de marque sur votre bougie (si’w di moun lan 100 mo, balenn lan dwe gen 100 mo). Cependant cette façon de faire n’est pas immuable. Et quelques témoignages vont le démentir et nous réserver bien des surprises.

Ensuite, il faut mettre la bougie sous votre oreiller. Dans la nuit cette personne-là vous apparaitra. Bien des témoignages tendent vers ce chemin alors autant les narrer.

-1-

Mon père venait de mourir et je doutais de sa mort. Je voulais savoir comment il était mort mais je ne savais pas vraiment comment faire, et il était hors de question d’aller voir un prête vaudou. Tous les gens m’entourant me poussaient pourtant à y aller. Mais je ne savais pas vraiment quoi faire et ni quel pied mettre devant. Etant enfant unique toutes les responsabilités pesaient sur moi.

Il fallait agir ! Mais comment ?

Le soir de la veillée cette idée jonglait dans ma tête. Tous les gens me posaient une seule et même question w’ap kite papa’w ale konsa vre ? Ou pap fe anyem ? li pa’t malad ase pou’l te mouri la ? Toute une litanie de questions qui tournaient et retournaient dans ma tête. Et quoi encore? Qu’en savaient-ils ?

Alors que rien ne venait en tête, et que j’étais au bord de la crise, un ami qui passait son temps à festoyer, soûl comme un chien me disait d’utiliser une bougie pour parler avec mon père. Pourquoi pas ? C’était le seul a vraiment me donner une idée à laquelle j’étais prêt à m’y résoudre.

Il me donna pas de plus d’amples instructions, il en était d’ailleurs incapable. Suivant son exemple après que la dernière personne de la maison fut endormie, seul dans ma chambre je m’y adonnais.

Avais-je une idée de ce que je faisais ? Aucune ! Avais-je une foi quelconque de ce que je faisais? Je ne dirais pas !

Prenant une bougie, l’allumant dans un coin sans autre forme de procès, je me suis mis fortement à penser à mon père le visualisant devant moi et je me suis mis à le parler. La nuit passa ainsi jusqu’à ce que sommeil s’en suive.

Un mois après l’enterrement de mon père, un de ces vieux amis passa prendre de ces nouvelles. A ces questions on voyait bien qu’il ne savait rien de la mort de son ami. Il était passé à la va vite prendre de ses nouvelles après un rêve étrange ou il était question de mon père.

« Ils étaient deux à marcher sur une route, arrivés près d’un arbre fruitier mon père s’arrêta et lui disait que les fruits murs qui étaient arrivés à leur terme se détachaient de l’arbre et que les autre y restaient »

Eureka ! La réponse que j’attendais ! Je me suis mis à rire en regardant le ciel pour finir par le prendre dans mes bras. J’en profita pour lui dire que mon père avait déjà un mois depuis qu’il était plus de ce monde.

Ps : Son père était mort de façon naturelle et aucunement le fruit d’une malvoyance.

-2-

Bientôt deux ans suite au décès de ma mère, je savais toujours pas comment m’y faire. Bien que ce n’était pas une mort naturelle, je laissais le temps suivre son cours. Les gens pointaient les responsables de sa mort du doigt, mais j’étais autant aveugle que sourde. Simple question de choix !

Jamais je n’ai essayé de rentrer en contact avec elle ou encore de chercher les raisons de sa mort. Elle n’était plus de ce monde et pour moi c’était un fait. Plusieurs personnes pourtant m’ont encouragé dans cette route.

Deux semaines avant les 2 ans de la mort de ma mère, nos chiens (semi berger allemand mâle et femelle) tombèrent subitement malade. Ce n’était aucunement une maladie scientifique. D’ailleurs aucuns vétérinaires ne trouvaient une remède à leurs maux. Nous étions tous perplexe.

Les jours passaient et la souffrance des chiens augmentaient. On ne pouvait tout simplement se résoudre
à les tuer. Mais je n’avais vraiment pas le cœur et surtout c’était les deux derniers enfants de ma mère.

Les gens nous disaient bien que c’était encore un coup des personnes qui avait tué notre mère. Mais on faisait encore la sourde oreille et on essayait de cacher tant bien que mal les chiens. Deux jours avant les 2 ans de ma mère, j’ai été de sorti avec un ami (celui du témoignage d’avant) et à la lumière des réponses qu’il a eu, il m’a conseillé de faire de même. Qu’avais-je à perdre ? J’ai décidé de suivre son conseil.

Le soir même je me suis mise au travail. Encensant la chambre pour plus d’intimité, allumant ma bougie je me suis à parler à ma mère comme si elle était là. Pluie de pleurs, de rire je ressentais même sa présence (ou c’était dans ma tête, toujours est-il que cela me faisait un bien fou). Je lui parlais des chiens, lui demandant d’intervenir au plus vite car ils en pouvaient plus, j’en pouvais plus !

Était-ce l’urgence de la demande ou la gravite de la situation ou simple caprice de la vie, toujours est-il que le lendemain à un jour près des deux ans on retrouva les chiens raides morts. Ils étaient paisibles comme si enfin ils trouvaient la paix.

-3-

Depuis toute petite je rêvais de mariage, ayant grandi dans un cocon d’amour j’ai toujours rêvé suivre les traces de mes parents. Tels étaient mes projets mais l’amour semblait pas en être informé.

Dès mon adolescence, je collectionnais les relations mais je n’arrivais pas à garder un homme plus de six mois. Pourtant je ne me décourageais pas, et mes parents aussi me poussaient à poursuivre. A mes
26 ans, j’ai réussi à garder un homme plus de six mois plus exactement 8 mois.

C’était ainsi donc l’homme à marier. Un mois plus tard, nous étions en plein des préparatifs. Une semaine plus tard, mon fiancé tomba malade. Et malheureusement le jour de notre mariage, il rendit son dernier
souffle. Qu’ai-je donc fait a Cupidon pour mériter un tel sort ?

Etant élevée dans une famille de vaudouvi (fervent pratiquant du vaudou) dans les règles de l’art, j’entrepris de parler à mon bien-aimé à travers une bougie le soir même. Ma surprise fut grande lorsque le lendemain matin mes parents vinrent me parler de ma naissance.

Je n’étais qu’un cadeau des loas et je n’avais aucun libre choix de mon homme.

Ps : Pour les enfants cadeaux des loas, je ne sais pas grand chose. Sinon que les parents auront toujours une dette à payer au risque de perdre à jamais leur enfant. Et surtout, les enfants n’ont pas le droit de tout faire car ils ont une ligne à suivre.

Les faits sont légions pourtant les langues tardent à délier, de peur de s’affirmer ou de crainte d’un je ne sais quoi. Toujours est-il que parler avec les morts c’est monnaie courantes et même les voir aussi.

Raphlee
Janvier 2022


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