Man pa ni an pié lajan ka soukwè
Il était une fois un jeune garçon que sa mère était seule à élever. Ils vivaient dans la misère. Maigre repas. Vêtements usés. Semelles trouées. Cheveux trop longs, faute de pouvoir aller chez le coiffeur.
Le garçon se plaignait souvent pour toutes ces privations. Et la mère gémissait à son tour:
-Tu me fends le cœur, mon fils. S’il n’était que de moi, tu ne manquerais de rien. Mais où veux tu que je prenne l’argent? Je n’en au pas un pied à secouer.
L’arbre que l’on secoue pour en faire tomber des pièces et des billets resta dans la tête du jeune garçon. La bonne façon d’avoir de l’argent, c’était bien celle-la. Aussi, sitôt qu’il le put, il se mit en quête d’un pied d’argent.
Il alla trouver un sorcier de grande réputation:
-Mon fils, lui dit celui-ci, si le pied d’argent existait, je l’aurai en ma possession depuis longtemps. Et si, maintenant, j’en trouvais un, je le garderais pour moi.
Le jeune garçon ne se découragea pas. Il alla trouver un second sorcier, de plus grande réputation encore. Celui-ci lui dit:
-Mon fils, un pied d’argent, cela existe. Mais pour parvenir à faire tomber ses fruits, il te faudrait le secouer cent ans.
Le jeune garçon allait abandonner quand il rencontra un troisième sorcier, plus réputé encore que les deux premiers. Celui-ci entra dans sa cuisine et en ressortit avec un petit pot à la main. Dans le pot, il y avait un pépin qui commençait tout juste à germer.
-J’ai ton affaire lui dit le sorcier. Ceci est un pied d’argent. Tu le planteras devant ta porte, et tu l’arroseras chaque jour. Il commencera par porter des oranges. Puis, quand son feuillage atteindra la hauteur de ton toit, il portera des pièces, puis des billets. Mais cela, à une condition. Tu devras, chaque année, le jour de l’an, m’apporter mille euros en argent liquide.
Le garçon promit de faire ainsi. Il tint promesse. Il arrosa chaque jour l’oranger qui, chaque année, grandissait d’un peu. Et chaque année, au premier de l’an, au prix de dures privations, il allait porter mille euros au mentor.
L’année où l’arbre atteignit le faîte de la maison, il porta encore des orange. Mais pas de pièces, encore moins de billets.
Le garçon s’en ouvrit au sorcier:
-Je n’ai vu ni pièces ni billets, se plaignit-il.
-Sois tranquille. C’est bien un pied d’argent. Les pièces et les billets sont là, même si tu n’en vois pas la couleur. Je les ramasse pour toi au premier de l’an.
Contes des quatre croisées de Georges Mauvois
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