By the rivers of Babylon
Kei Miller
Roman caribéen
Parution en 2017
“Augustown, quartier pauvre de Kingston, Jamaïque. En cet après-midi d’avril 1982, assise sur sa véranda, Ma Taffy sent dans l’air une pesanteur très particulière. Kaia, son petit-fils, rentre de l’école. Ma Taffy n’y voit plus mais elle sait reconnaître entre toutes l’odeur entêtante, envahissante, de la calamité qui se prépare.
Car aujourd’hui, à l’école, Monsieur Saint-Josephs a commis l’irréparable : il a coupé les dreadlocks de Kaia – sacrilège absolu chez les rastafaris. Et voilà Ma Taffy qui tremble, elle que pourtant rien n’ébranle, pas même le chef du gang Angola ni les descentes des Babylones, toutes sirènes hurlantes.
Alors, pour gagner du temps sur la menace qui gronde, Ma Taffy se met à lui raconter comment elle a assisté, petite fille au milieu d’une foule immense, à la véritable ascension d’Alexander Bedward, le Prêcheur volant.”
Prix Carbet des Lycéens 2019.
Prix Pierre-François Caillé de la traduction 2018.
Prix Les Afriques 2018.
Prix Carbet de la Caraïbe et du Tout-Monde 2017.
OCM Bocas Prize for Caribbean Literature 2017.
Mon avis
L’histoire prend source dans une vallée jamaïcaine où les esclaves affranchis se réfugièrent le matin de l’émancipation en 1838. Ce qui fut jadis un paradis verdoyant est devenu un ghetto de la banlieue de Kingstown où vivent des petites gens. S’ils ont été débarrassés des chaînes de l’esclavage, restent toujours victimes des clivages ethniques et sociaux marqués par les persécutions policières.
En effet, Augustown dans les années 80 est un quartier particulièrement pauvre de Kingston où résident les laissés pour compte comme les rastas. Le quotidien des habitants est marqué par la violence et la misère. Mais surtout par les affrontements entre le gang local (Angola) et les babylones. Ces derniers martyrisent et à rasent sans aucun scrupule les cheveux des rastas en prétextant qu’ils sont tous des fous et des vendeurs de gandja.
Mais un jour, un instituteur de l’école du quartier sur un coup de folie coupe les dreadlocks d’un petit garçon rastafari. Ce geste infâme déclencha la colère des habitants mais surtout celle de Ma Taffy la grand-mère du petit garçon. Mais si la catastrophe est annoncée, Ma Taffy veut autant que possible en retarder le moment, aussi se met-elle à raconter à Kaia cette légende qui veut qu’un jour, il y a bien longtemps, Alexander Beward, prêcheur de son état, ait réussi à s’élever dans les airs
Ce fameux Bedward prétendait avoir eu des visions de Dieu lui-même et beaucoup de prophète, tels que Jonas, Moïses, et Jean-Baptiste étaient réincarnés en lui. Il proclamait que le 31 décembre 1920, il monterait au ciel pour déclencher l’apocalypse sur les nouveaux maîtres. Finalement il fut arrêté et interné dans un asile.
Cet internement serait ce une manœuvre des autorité pour l’empêcher de voler vers le ciel? Ou Bedward était vraiment fou?
Seule Ma Taffy saura nous éclairer sur ce mystère….
Da one ya name Attaclaps
Sizzla Kalonji
Babylon a guh collapse
Jah know mi really haffi grow mi locks
Da one ya a de Attaclaps, Attaclaps
Thunder roll and more ligthning flash
Je me suis régalée devant la simplicité de l’écriture de Kei Miller et la saveur des dialogues, pimentée et colorée, qui fleure bon la Caraïbe.
Le titre de ce roman, tiré du Livre des Psaumes ( “Au bord des fleuves de Babylone nous étions assis et nous pleurions, en nous souvenant de Sion”), fait référence aux racines bibliques du rastafarisme. Et invitent le peuple à se battre pour ses droits à travers des thèmes aussi fondamentaux que la politique, l’esclavage, la religion et la pauvreté.
“L’histoire de Bedward, dit elle, c’est pas ce qu’on vous a raconté. C’est pas l’histoire d’un fou qui se met à croire qu’il veut voler comme ça. Ni l’histoire d’un couillon maladroit qui dégringole d’un arbre. Tu m’entends, Kaia?
L’histoire d’un homme qu’essaie d’accomplir quelque chose de grand, qu’essaie d’aller plus haut que ce qu’on aurait cru d’un homme comme lui capable d’atteindre….La vieille femme s’arrête. Déconcerté par le ton sérieux qu’a pris sa propre voix, elle hausse les épaules.
Enfin, c’est juste une histoire comme plein d’autres dans cette foutue île de Jamaïque; juste un homme qui lutte et que ce maudit pays a décidé de mettre à terre.”
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